J’ai revu, il n’y a pas longtemps, l’instructrice qui m’a mis à cheval. J’en ai un souvenir ému, comme tous ses anciens élèves. Elle se reconnaîtra si par un immense hasard elle lit ces lignes.
Ce jour-là, elle a tenté de ramener à mon souvenir une demande que je lui avais faite de bien vouloir me laisser participer à un concours hippique qui s’organisait. Je devais avoir quinze ou seize ans à l’époque. J’avais formulé cette demande par écrit et en vers.

Je ne me suis absolument pas rappelé cette anecdote.

Je voudrais essayer de retrouver cette dame pour lui offrir le MAITRE DE MANEGE. Après tout, c’est un peu grâce à elle si j’ai pu l’écrire.

Vendredi 16 janvier, 20 heures

J’ai retrouvé son téléphone dans l’annuaire et je l’ai appelée. Naturellement, elle a été surprise de m’entendre. Lorsque je l’avais revue, c’était il y a 5 ans je crois. Et avant cela, c’était il y a 40 ans. C’est dire que j’étais complètement sorti de son esprit.

Je lui ai dit :

«Je voudrais vous faire un cadeau».

Elle n’a pas compris.

«J’aimerais venir vous voir demain, car je voudrais vous faire un cadeau» ai-je répété.

«Ah!»

Nous avons pris rendez-vous pour demain.

Samedi 17 janvier, 11h du matin

C’est une toute petite dame rabougrie qui m’ouvre. Elle se tient debout grâce à une canne. Je la reconnais à son sourire. Je ne pensais pas qu’elle avait à ce point changé  en cinq ans. Jeune, elle était une femme forte en gueule, dynamique et sportive, et infiniment gentille.

Nous sous sommes embrassés.

J’apprends qu’elle a un cancer du péritoine. Les médecins lui ont dit qu’on ne pouvait pas le soigner. Au mieux, freiner l’évolution. «Ça y est, me dit-elle, je suis sur la pente glissante» Puis elle ajoute : «Il suffit de l’admettre. Si on l’admet, tout va bien. Si on ne l’admet pas, c’est l’enfer. Moi ! Je l’ai admis»

C’est une sacré bonne femme de 80 ans que j’ai devant moi. Nous n’avons plus parlé de son cancer au cours de ma visite. Tout de suite, elle m’a parlé de chevaux. Je lui remets le livre. Elle lit attentivement le quatrième de couverture, puis feuillette quelques pages au hasard, en lit des passages. Avec émotion elle hoche la tête et dit :

«C’est une grande récompense pour moi… de voir que quelque chose a perduré jusqu’à aujourd’hui»

Elle a voulu que je le lui dédicace le livre. Alors j’ai écris : «à notre maître de manège qui nous a appris bien plus que l’équitation. Très affectueusement…»

Elle m’a rappelé le 28 février suivant : cliquez